Un agent conversationnel pour naviguer dans les mondes virtuels

de Christophe Godéreaux, Pierre-Olivier El Guedj, Frédéric Revolta et Pierre Nugues, Caen (F)

Membres du laboratoire GREYC, commun à l’Institut des Sciences de la Matière et du Rayonnement et à l’Université de Caen, Caen (F)

 

1. Introduction

Nous présentons ici un agent conversationnel pour naviguer dans un monde virtuel. La navigation se révélant être l’un des points les plus délicats pour les nouveaux utilisateurs de ce type d’environnement. Notre prototype se constitue d’un dispositif de reconnaissance vocale du commerce ainsi que d’un circuit de synthèse de parole. Il s’appuie sur une architecture modulaire reliée à un environnement virtuel. Les entités du prototype ont pour rôle de traiter l’analyse syntaxique et sémantique, ainsi que le dialogue et les actions qui en résultent (Nugues, 1993; Nugues, 1994). Elles permettent à l’utilisateur de se déplacer à la voix dans un monde relativement complexe. Le système résultant s’intégrera dans un outil de téléconférence. Ce projet à été développé dans le cadre du programme COST-14 de la Commission des communautés européenne sur le travail coopératif à l’aide de l’ordinateur (COTECH, 1995). Dans ce COTECH, nous étudions plus particulièrement les outils linguistiques pour intégrer des possibilités de dialogue oral avec des assistants virtuels.

2. La réalité virtuelle et le travail coopératif

La réalité virtuelle est une des composantes des techniques multimédia et des autoroutes de l’information. Elle permet à un utilisateur la visualisation et l’interaction avec des données informatiques. Les systèmes de réalité virtuelle sont très dépendants du niveau technique de leurs différents composants. En effet, pour procurer des sensations réalistes, ces systèmes doivent simuler des scènes parfois complexes et interagir avec l’utilisateur en temps réel. La contribution des interfaces d’entrées-sorties dans leur amélioration est fondamentale. La qualité de la communication entre l’homme et les mondes virtuels dépend souvent de leur choix et de leur efficacité.

Les recherches sur le travail coopératif à l’aide de l’ordinateur – Computer Supported Cooperative Work (CSCW) – tentent de déterminer comment l’informatique peut aider des groupes de gens à travailler ensemble sur un projet, pour élaborer un produit, pour prendre une décision, etc. (Grudin, 1994). Le travail coopératif à l’aide de l’ordinateur fait parfois appel à des techniques de réalité virtuelle, par exemple pour créer des métaphores de salles de réunion. La société Xerox l’utilise pour structurer les interfaces graphiques (Robertson, 1993). Ces applications impliquent un accès multi-utilisateurs, à travers un réseau, à un même monde virtuel.

L’utilisation de métaphores de travail au bureau, comme des salles de réunion virtuelles dans certaines applications de téléprésence (Benford, 1993), peut aider à l’interaction dans un groupe en la rendant plus naturelle. Les techniques informatiques sont alors un intermédiaire pour des interactions entre personnes qui partagent un espace de travail virtuel.

Les métaphores utilisées ne permettent cependant pas, et probablement jamais, la même commodité et la même facilité que les interactions du monde réel. Cependant nous pensons qu’il est possible de les améliorer dans une large mesure et de faciliter l’accès à tous à ce type de travail. Pour rendre l’accès plus facile à ce type de mondes virtuels, l’interaction vocale ou linguistique est sans doute l’une des plus naturelle.

3. La réalité virtuelle et le dialogue oral

3.1. Pourquoi une interface de dialogue oral dans un monde virtuel

Des interfaces orales commencent à apparaître dans les systèmes de simulation ou dans les mondes virtuels (Allen, 1994; Ball, 1995; Bolt 1980; Karlgren, 1995). Elles sont à ce jour moins répandues que d’autres interfaces et très peu d’applications sont parvenues à un stade commercial. Ceci est sans doute dû au fait que ces interfaces sont très dépendantes du bon fonctionnement de la reconnaissance vocale dont la fiabilité n’était pas satisfaisante jusqu’à il y a peu.

L’interaction orale est pourtant un enjeu et permet d’améliorer sur certains points le réalisme des environnements virtuels. D’une manière générale, trois notions sont incluses dans les mondes virtuels (Quéau, 1993) : l’immersion, la navigation et l’interaction. Une interface de dialogue oral dans ces mondes facilite et amplifie ces trois notions pour l’utilisateur (Godéreaux, 1994).

L’immersion fait référence aux techniques d’immersion physique dans l’image grâce aux casques stéréoscopiques. Une interface de dialogue oral amplifie cette notion en ajoutant à cette immersion dans l’image, une immersion dans le son et la parole.

La notion de navigation traduit la possibilité d’évoluer, de se rencontrer, dans des univers virtuels. La navigation dans ces mondes virtuels est par essence complexe puisqu’elle se situe dans un espace à trois dimensions. Les systèmes de réalité virtuelle disposent de périphériques d’entrée, telles que la souris, le clavier, les manches à balai..., permettant de se déplacer dans un environnement tridimensionnel. Elles demandent à l’utilisateur un certain temps d’adaptation avant de pouvoir naviguer aisément. Ces interfaces permettent des déplacements rapides, lents ou précis dans un plan donné. Les déplacements sont cependant plus difficiles lorsque l’on désire "s’aligner" par rapport à un objet du monde; par exemple, pour se placer devant un tableau ou une porte permettant d’accéder à un autre monde. Ceci est d’autant plus difficile que l’objet ne se trouve pas dans le plan principal de déplacement.

Le dialogue oral par commandes simples facilite la navigation. L’adaptation de l’utilisateur est immédiate dès que, par exemple, un dialogue présenté par la fig. 1, est possible. Un dialogue plus élaboré comme celui de la fig. 2 permet de "s’aligner" avec précision par rapport à un objet du monde.

Système

Pour vous déplacer vous pouvez dire, avance, recule, monte, descend, gauche, droite, stop.

Utilisateur

avance

Utilisateur

monte

Utilisateur

stop

fig. 1 Un dialogue simple.

Utilisateur

Place-toi devant le tableau.

Utilisateur

Vers quel autre monde puis-je aller?

Système

Vers le monde conférence ou le monde nature.

Utilisateur

Place-toi devant la porte du monde conférence.

fig. 2 Un dialogue avec alignement.

La notion d’interaction fait référence à la manipulation de l’image, à sa transformation. Un grand nombre de modeleurs 3D pour les systèmes de réalité virtuelle existe déjà. Une interface de dialogue oral peut faciliter l’utilisation de ces modeleurs dans la désignation des objets puis dans leur manipulation. De plus il est aisé pour l’utilisateur de combiner navigation et interaction en s’exprimant oralement.

D’une manière générale, une interface de dialogue oral dans les mondes virtuels est un complément des interfaces classiques même si elle est parfois moins précise. Notamment, elle facilite la tâche de l’utilisateur dans la découverte de ces univers.

3.2. Un système de réalité virtuelle pour le travail en groupe : DIVE

DIVE, Distributed Interactive Virtual Environment, est un environnement virtuel réparti. Il se fonde sur le système d’exploitation Unix et les protocoles Internet (Andersson, 1994). Il a été développé par le Swedish Institute of Computer Science (SICS), membre de COST 14. Il a notamment comme but d’être un outil de téléconférence. Chaque utilisateur de DIVE, connecté au réseau Internet, est représenté graphiquement par un agent virtuel et dispose d’outils qu’il peut manipuler cf. fig. 3.Chaque agent virtuel dispose d’un véhicule. Ce véhicule est représenté sur l’écran par trois icônes attachées à trois modes de déplacement : translation horizontale, verticale et rotation.

Conceptuellement, ce système peut se décrire comme une mémoire partagée par un ensemble de processus interagissant sur celle-ci. Cette mémoire partagée se répartit en mondes. Chaque monde représente un ensemble spécifique d’objets et de paramètres complètement distincts des autres mondes. Un processus de DIVE est un membre d’exactement un seul monde. Il existe des processus de visualisation et des processus de type application :

fig. 3 Le monde Conférence de DIVE vu par un des quatre utilisateurs connectés.

4. Corpus de dialogues

Nous avons réuni un corpus de dialogues afin d’étudier l’utilisation de la langue orale dans ces environnements virtuels. Cette démarche est cruciale pour identifier les problèmes n’apparaissant pas dans la réalité et laisser de côté ceux ne semblant intéressants que dans l’abstrait (Allen, 1994). Pour chaque dialogue une personne joue le rôle de l’utilisateur et une autre celui de l’agent virtuel. Ces dialogues sont enregistrés sur bandes magnétiques puis retranscrits sur machine. Nous avons collecté quatre dialogues, d1, d2, d3 et d4, avec à chaque fois un utilisateur différent, ceci pour obtenir une plus grande couverture linguistique. En revanche, le rôle de l’agent virtuel est toujours interprété par la même personne afin de garder une cohérence globale dans son discours. Des extraits de ces dialogues sont représentés sur les fig. 4 et fig. 5. U est l’utilisateur et A est l’agent virtuel.

4.1 Extraits du corpus

A

nous sommes connectés au monde robot.

U8

tourne sur toi-même.

A

vers la droite ou vers la gauche?

U9

vers la droite.

A

voilà.

U10

prends de la hauteur.

U11

arrête de monter.

U12

monte.

A

oui.

U13

stop.

fig. 4 Extrait 1 du dialogue d4

U45

va jusque là.

A

je me dirige vers la montagne.

U46

fait le tour de la montagne.

A

oui.

U47

retourne sur l'île précédente

A

je ne connais pas l'île précédente.

U48

regarde à droite.

A

voilà.

U49

encore.

U50

c'est ici.

A

je me dirige vers la montagne.

fig. 5 Extrait 2 du dialogue d4

4.2. Statistiques

Nous avons calculé diverses statistiques sur ce corpus. Nous avons étudié chaque dialogue (corpus d1, d2, d3 et d4) un à un, puis le cumul de ces dialogues. Chacune de ces études traite le discours de l’utilisateur, puis le discours de l’agent virtuel.

Nous parvenons aux constatations suivantes pour le discours de l’utilisateur :

5. Prototype d’Interface de dialogue oral dans les mondes virtuels

5.1. Architecture

Le système se compose notamment d’une carte de reconnaissance vocale, d’un analyseur syntaxique, d’un analyseur sémantique, d’un gestionnaire de dialogue et d’un gestionnaire d’actions. Ces modules s’articulent dans l’architecture de la fig. 6.

fig. 6 Architecture.

5.2. Analyse syntaxique

5.2.1 Analyse du corpus : création du lexique de l’utilisateur

L’analyseur syntaxique accepte des mots provenant du système de reconnaissance vocale. Il utilise un lexique fondé sur l’analyse des corpus. Il consiste dans l’ensemble des 327 mots distincts de l’utilisateur que nous avons catégorisé par des catégories lexicales. Chaque entrée du lexique comprend en outre son codage phonétique, son orthographe et une liste de traits de sous-catégorisation. Par exemple, le codage de le, la, table, avance est montré par la fig. 7.

Mots

Traits

le

DET le

DET nombre = sing

DET genre = masc

la

DET la

DET nombre = sing

DET genre = fem

table

NOUN table

NOUN nombre = sing

NOUN genre = masc

avance

VERB avance

VERB nombre = sing

fig. 7 Un exemple de lexique.

L’analyse des énoncés de l’utilisateur fait ressortir l’utilisation de locutions prépositives et adverbiales. Ces groupes de mots ont à eux seuls une fonction grammaticale. Ils sont traités par notre analyseur comme une seule entité linguistique. Ces locutions correspondent à des entrées supplémentaires dans le lexique dont les principales sont représentées par la fig. 8.

Locutions prépositives

Locutions adverbiales

à l’intérieur de à_l_intérieur_de

du côté de du_côté_de

en arrière de en_arrière_de

en avant de en_avant_de

en face de en_face_de

jusqu’à jusqu_à

à droite à_droite

à gauche à_gauche

en arrière en_arrière

en avant en_avant

en bas en_bas

en face en_face

en haut en_haut

fig. 8 Quelques locutions prépositives et adverbiales.

 

5.2.2 Analyse syntaxique

Nous avons développé un analyseur syntaxique fondé sur les techniques de Chart (El Guedj, 1994). Cet analyseur accepte des treillis de mots permettant le traitement en parallèle de plusieurs hypothèses lexicales. Il utilise des grammaires syntagmatiques et de dépendances enrichies d’équations d’unification. Pour cette application, nous nous sommes restreints à une grammaire syntagmatique du fait de la brièveté des énoncés à analyser – 5 mots en moyenne. L’analyseur accepte les mots séquentiellement et les analyse au fur et à mesure de leur énonciation jusqu’à ce que la phrase soit complète. Il peut opérer en mode descendant ou en mode ascendant. L’analyseur rejette tout mot entraînant une phrase agrammaticale, c’est à dire lorsque aucune règle syntaxique ne peut s’appliquer pour traiter ce mot. Un exemple de grammaire syntagmatique avec équations d’unification est décrit en fig. 9.

Règles syntagmatiques

Équations d’unification

PH -> PHRASE FIN

 

PHRASE -> GN GV

PHRASE type = affirmation

GN nombre = GV nombre

PHRASE -> GV

PHRASE type = ordre

GN -> DET NOM

DET nombre = NOM nombre

DET genre = NOM genre

GN nombre = DET nombre

GN genre = NOM genre

GV -> VERBE

GV nombre = VERBE nombre

fig. 9 Un exemple de grammaire syntagmatique avec équations d’unification.

Notre système utilise une grammaire permettant d’analyser syntaxiquement tous les ordres de l’utilisateur présents dans le corpus. La fig. 10 représente cette grammaire. Les autres groupes syntagmatiques sont classiques et correspondent à la fig. 11. Les catégories lexicales apparaissant dans ces deux figures sont décrites par la fig. 12.

Groupes de règles d’analyse des ordres

Rôles des règles

R_ORDRE -> R_ORDRE0

R_ORDRE -> R_ORDRE0 R_ORDRE

R_ORDRE -> R_ORDRE0 CONJCOORD R_ORDRE

Analyse récursive d’un ordre ou d’un ensemble d’ordres.

R_ORDRE0 -> R_VIMP

R_ORDRE0 -> R_VIMP R_GN

R_ORDRE0 -> R_VIMP R_GPREPN

R_ORDRE0 -> R_VIMP R_GPREPV

R_ORDRE0 -> R_VIMP VINF R_GPREPN

Analyse d’un ordre simple qui consiste en un groupe verbal à l’impératif et un ou plusieurs autres groupes syntagmatiques.

R_VIMP -> V

R_VIMP -> V R_ADV

R_VIMP -> V R_PRONOM

R_VIMP -> V R_PRONOM R_ADV

Analyse du groupe verbal.

fig. 10 Règles d’analyse des ordres.

Autres règles d’analyse syntagmatique

Rôles des règles

R_GN

analyse d’un groupe nominal.

R_GPREPN

analyse d’un groupe prépositionnel nominal.

R_GPREPV

analyse d’un groupe prépositionnel verbal.

R_ADV

analyse d’une suite d’adverbes.

R_PRONOM

analyse d’un pronom personnel, ou adverbial.

fig. 11 Règles d’analyse de syntagmes.

Quelques catégories lexicales

Rôles des catégories

VINF

catégorie du lexique des verbes à l’infinitif.

V

catégorie du lexique des verbes conjugués (les équations d’unifications de R_VIMP vérifient l’emploi de l’impératif).

CONJCOORD

catégorie du lexique des conjonctions de coordinations.

fig. 12 Quelques catégories lexicales.

5.3 Analyse sémantique et discursive

Dans ce prototype, les énoncés de l’utilisateur sont pour la plupart des énoncés relatifs à des actions : des ordres. Un énoncé de ce type est constitué d’une ou de plusieurs actions.

• Exemple 1 : Un énoncé composé d’une seule action :

U: Monte sur la table blanche.

-> action1 = monter sur OBJET

• Exemple 2 : Un énoncé composé de trois actions :

U: avance en montant et regarde en bas.

-> action1 = avancer

-> action2 = monter

-> action3 = regarder DIRECTION

L’analyseur sémantique décompose le Chart, retourné par l’analyseur syntaxique, en une liste d’actions. D’après les énoncés qui apparaissent dans notre corpus, cette décomposition dépend de plusieurs paramètres :

Nous utilisons une grammaire de cas afin de représenter sémantiquement une action sous la forme de structure prédicative (Mast, 1993). Le verbe de l’action correspond au nom du prédicat. Les autres constituants de la phrase sont associés aux paramètres de la structure prédicative. Par exemple, le verbe " monter " et le verbe " regarder " sont associés aux prédicats:

monter([sens, ALLER],[lieu_par_defaut, EN_HAUT]).

regarder([sens,REGARDER],[lieu_par_defaut, EN_AVANT]).

La liste des actions est ensuite transmise au gestionnaire d’actions. Si ces actions sont exécutables, le gestionnaire du dialogue acquiesce l’ordre de l’utilisateur par un message positif aléatoire. Dans le cas contraire le gestionnaire de dialogue signale oralement la cause de la non-exécution de l’ordre. La synthèse orale permet à l’utilisateur de modérer son attention visuelle ordinairement accaparée par le flot continu d’images.

Le gestionnaire d’actions vérifie et exécute les actions transmises par l’analyseur sémantique. Il utilise un résolveur de références et un module de raisonnement géométrique.

5.4. La résolution des références

5.4.1 Le nommage et le codage des objets

Associer un nom à un objet est parfois une tâche complexe. Les utilisateurs peuvent utiliser un vocabulaire différent pour désigner la même chose. Ils peuvent aussi considérer certains objets comme des compositions ou des hiérarchies alors que dans la base de données, ils forment des entités uniques. Une maison peut se représenter comme un ensemble de lignes polygonales ou bien un ensemble de sous objets tels qu’un toit, une porte, des fenêtres, etc. Ces sous objets étant constitués soit d’autres sous structures, soit des lignes polygonales. De plus, il faut tenir compte de l’orientation des objets : le " devant d’une maison " n’est pas la même chose que le " devant d’un cube ".

Dans le prototype actuel (Revolta-Blaudeau, 1995), les objets sont des entités géométriques de la base de données du monde auxquelles on associe un concept par exemple maison. Ce nommage est bien sûr dépendant de la structure de la base de données géométrique. Nous avons cherché à établir les correspondances les plus pertinentes en fonction de notre corpus.

Pour ce qui concerne l’orientation, nous avons cherché à respecter un principe unique : si on peut aller à l’intérieur de l’objet, le centre de son référentiel est au centre de l’objet et c’est l’endroit où sera placé l’utilisateur s’il demande à rentrer à l’intérieur. Il faut donc le définir judicieusement. De plus, pour repérer sa face de devant s’il en a une, l’axe des z de son référentiel est orienté vers cette face.

5.4.2 L’algorithme de résolution de références

Les références et les désignations ambiguës sont multiples dans notre corpus. Elles proviennent notamment de références déictiques

va ici

ou de possibilité de choix multiples

dirige toi vers la maison (parmi plusieurs)

Pour lever ces ambiguïtés, nous avons utilisé deux critères : le fait qu’un objet soit dans le champ de vision de l’utilisateur et un focus dont on a pourvu chaque objet. Ce focus s’inspire de (Huls, 1995; Karlgren, 1995). Il consiste en un coefficient mis à jour en fonction des interactions de l’utilisateur. Il permet de résoudre d’une manière simple les ambiguïtés de désignation. Pour chaque utilisateur, chaque objet du monde dispose d’un focus – un nombre entier –. Le focus d’un objet devient majorant de tous les autres lorsque l’utilisateur clique sur cet objet (désignation sans équivoque) ou lorsqu’il le désigne dans une phrase.

5.5. Le module de raisonnement géométrique

Le module de raisonnement géométrique intervient comme intermédiaire entre les énoncés de l’utilisateur et le monde virtuel. Il constitue la principale entité de raisonnement de l’agent. Nous présentons ici le raisonnement que cet agent met en œuvre lorsque l’utilisateur lui donne des ordres de navigation. Ces ordres consistent dans des énoncés qui contiennent toujours un verbe. Pour l’instant, nous distinguons cinq catégories de verbes. Ils correspondent à la catégorie Changement de lieu cité par (Aurnague, 1994) :

La fig. 13 présente un exemple de dialogue réalisé par notre prototype ainsi qu’une série de copie d’écran associée.

Énoncés et interactions de l’utilisateur

Énoncés de l’agent

Copies d’écran

 

.

 

 

 

 

 

va devant la maison.

Bonjour bienvenue dans le monde Ithaques

 

 

 

 

 

Voilà.

 

 

 

 

 

Regarde derrière toi.

 

 

 

 

 

 

 

Voilà.

 

 

Est-ce que tu peux entrer dans la maison ?

 

 

 

 

-- L’utilisateur clique sur le bouton gauche de la souris --

entre dedans.

 

 

 

 

Il y en a plusieurs.

 

 

 

 

 

 

D’accord.

fig. 13 Exemple de dialogue.

6. Conclusion

Nous avons réalisé l’intégration d’un prototype d’agent conversationnel pour naviguer oralement dans un système de réalité virtuelle. Dans un premier temps, nous avons justifié l’utilisation d’un tel type d’agent dans un monde virtuel. Puis, nous avons présenté un corpus de dialogue et les statistiques que nous avons obtenues à partir de celui-ci. Ensuite, nous avons détaillé l’architecture du système et ses différents composants. Enfin, nous avons décrit l’implantation actuelle de notre agent.

Ce type d’agent conversationnel offre des perspectives importantes. Nous avons notamment le projet de l’adapter à la navigation orale dans une synthèse virtuelle de la ville de Rome antique. Cette synthèse étant réalisée par le Centre d’Études et de Recherches pour l’Antiquité de l’Université de Caen. Par ailleurs, au fur et à mesure de nos tests nous mettons en évidence de nouveaux besoins, tels que de nouvelles actions de navigation ou la création d’un agent de manipulation d’objets. Plus généralement nous pensons que ce type d’agent offre un cadre d’expérimentation unique pour le dialogue, la linguistique informatique ou encore le raisonnement géométrique.

Références

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Adresse des auteurs: Christophe Godéreaux, Pierre-Olivier El Guedj, Frédéric Revolta et Pierre Nugues, GREYC, ISMRA et Université de Caen, 6, Boulevard du Maréchal Juin, F-14050 Caen.

A Conversational Agent to Navigate in Virtual Worlds (Summary)

We describe the prototype of an interactive spoken dialogue interface in a virtual reality system. This prototype accepts utterances from a user enabling him or her to navigate into relatively complex virtual worlds. We first justify the significance of this type of interface in the communication quality between a user and virtual worlds. Then we present a corpus of dialogues and statistical results. Next we describe our prototype which includes a speech recognition device together with a speech synthesizer. The dialogue prototype consists in a syntactic chart parser for spoken words; a semantic analyzer handling the meaning of utterances; a reference resolution system; and a dialogue analyzer. It is integrated in the DIVE virtual reality environment developed at the Swedish Institute of Computer Science.